Le cannabis peut-il provoquer des troubles psychiques?
Même s'il n’est pas simple de répondre à cette question et s'il existe une grande variabilité entre les individus, la consommation de cannabis peut parfois être impliquée dans l’apparition, le maintien ou encore l’aggravation d'un trouble psychique. On distingue les troubles aigus ou transitoires, des troubles persistants.
Troubles aigus ou transitoires
Le cannabis, par son action sur le cerveau, entraîne des perturbations de la pensée, de l’humeur ou de la perception. Ces perturbations sont parfois tellement intenses qu'elles peuvent engendrer ce que l'on appelle une "psychose toxique". C'est à dire, une perte de contact avec la réalité caractérisée par des convictions paranoïaques, des délires, voire des hallucinations auditives (entendre des voix alors que personne ne parle). Les modifications psychiques dues au cannabis peuvent également induire ce que l'on appelle une "attaque de panique", une survenue brusque et transitoire d’un état d’angoisse très élévé, associé à de réelles sensations physiques (sentiment que le cœur bat brusquement plus vite, sentiment d’étouffer ou de difficultés à respirer, sueurs, tremblements, peur de perdre connaissance, de mourir ou de perdre le contrôle de soi, etc.).
Ces phénomènes sont parfois appelés "bad trip". Ces crises disparaissent avec l’arrêt de la substance, au bout d’un mois au plus tard pour la psychose toxique.
Troubles psychiques persistants
Il est beaucoup plus difficile d'établir la relation entre la consommation de cannabis et des troubles persistants. Ce problème peut être abordé en deux questions :
- Le cannabis peut-il favoriser l’apparition d’un trouble psychique persistant ?
- En cas de souffrance psychique ou de trouble psychique, le cannabis a-t-il une influence sur l’état psychologique d’une personne ?
Plusieurs travaux observent notamment une association entre la schizophrénie et une consommation précoce de cannabis. On retrouve statistiquement plus souvent des troubles de ce type chez les personnes ayant une consommation importante de cannabis au début de l'adolescence. Pourtant, cette association n’implique pas un lien de causalité, les deux phénomènes pouvant être, par exemple, dus à des causes communes. En l’état actuel des connaissances, rien ne permet d’établir un lien de causalité direct entre l’usage de cannabis et l’apparition ultérieure de la schizophrénie.
Concernant d'autres troubles psychiques, les données de certaines études indiquent que la consommation régulière de cannabis peut aggraver la sévérité des symptômes psychotiques.
En même temps, les découvertes récentes tendent à minimiser cet impact : il y a un lien indéniable en certains troubles psychiques et la consommation de cannabis mais l'un ne provoque pas invariablement l'autre.En d'autres termes, la directions causales n'est pas clairement établie.
Quoi qu'il en soit, il n'est jamais bénéfique de modifier la chimie du cerveau par une consommation chronique, particulièrement à l'adolescence où le cerveau est en pleine maturation.
Vulnérabilité génétique |
Pour en savoir plus...
Références
- American Psychiatric Association (1994) Diagnostic and Statistical Manual of Mental Disorders (4th edn) (DSMIV)
- Andreasson, S., Allebeck, P., & Rydberg, U., 1989. Schizophrenia in users and nonusers of cannabis. A longitudinal study in Stockholm County. Acta Psychiatr Scand, 79(5), 505-510.
- Arseneault, L., Cannon, M., Poulton, R., Murray, R., Caspi, A., & Moffitt, T. E., 2002. Cannabis use in adolescence and risk for adult psychosis: longitudinal prospective study. Bmj, 325(7374), 1212-1213.
- Favrat B, Ménétrey A, Augsburger M, Rothuizen LE, Appenzeller M, Buclin T, Pin M, Mangin P, Giroud C., 2005. Two cases of "cannabis acute psychosis" following the administration of oral cannabis. BMC Psychiatry. Apr 1;5:17.
- Fergusson DM, Horwood LJ, Ridder EM., 2005. Tests of causal linkages between cannabis use and psychotic symptoms. Addiction. Mar;100(3):354-66.
- Gruber AJ, Pope HG, Hudson JI, Yurgelun-Todd D., 2003. Attributes of long-term heavy cannabis users: a case-control study. Psychol Med. Nov;33(8):1415-22.
- Hambrecht M, Häfner H., 2000. Cannabis, vulnerability, and the onset of schizophrenia: an epidemiological perspective. Aust N Z J Psychiatry. Jun;34(3):468-75.
- Johns A., 2001. Psychiatric effects of cannabis. Br J Psychiatry. Feb;178:116-22.
- Linszen, D. H., Dingemans, P. M., & Lenior, M. E., 1999. Early psychosis and substance abuse. In P. D. McGorry & H.
- J. Jacksons (Eds.), Recognition and management of early psychosis: A preventive approach (pp. 363-375). New York: Cambridge University Press.
- Macleod J., Oakes, R., Copello, A., et al. 2004. Psychological and social sequelae of cannabis and other illicit drug use by young people: a systematic review of longitudinal, general population studies. Lancet, 363: 1579-1588.
- Patton GC, Coffey C, Carlin JB, Degenhardt L, Lynskey M, Hall W., 2002. Cannabis use and mental health in young people: cohort study. BMJ. Nov 23;325(7374):1195-8.
- Thomas, H., 1996. A community survey of adverse effects of cannabis use. Drug and Alcohol Dependence. 41, 201-207.